VOJISLAV KUZMANOVIĆ
J'AI TUÉ PETAR
(Ubio sam Petra – 1958)
Drame radio-diffusé
PERSONNAGES :
PUBA
LE JUGE
L'AVOCAT
LE PSYCHIATRE
ZORKO
PAVLE
MILENA
PETAR
SMILJKA
(Gong. Musique d'introduction.)
PUBA : J'ai tué Petar et c'est pour cela qu'on me juge. (Une pause. Plus bas.) J'ai tué Petar. Je voudrais bien n'avoir que rêvé tout cela et ne m'être réveillé après ce mauvais rêve, comme si rien ne s'était passé. Je voudrais vraiment n'avoir que rêvé tout cela. Je voudrais que cela ne soit pas la vérité. (Une pause.) Cela est impossible… j'ai tué Petar… (Fondu.)
(Murmure croissant de la salle d'audience)
LE JUGE : Accusé, reconnaissez-vous que vous avez tué Petar il y a un mois lors d'un dîner dans son appartement ?
PUBA : (Hésitant) Je le reconnais. Même si cela me paraît encore et toujours incroyable.
LE JUGE : Vous sentez-vous coupable ?
PUBA : Oui.
LE JUGE : Pouvez-vous nous expliquer pourquoi vous avez fait cela ?
PUBA : Non. Je ne peux pas.
LE JUGE : Vous vous aiderez vous-même et nous aiderez si vous dites juste la vérité.
PUBA : Je ne sais vraiment pas pourquoi je l'ai tué.
L'AVOCAT : S'il vous plaît ! L'accusé reconnaît qu'il a commis un meurtre. C'est suffisant. Nous allons démontrer dans la procédure probatoire que les coups de feu ont été tirés accidentellement.
LE JUGE : Le tribunal a le droit avant la procédure probatoire d'interroger l'accusé. (En connivence avec le public.) Cela signifie-t-il que vous affirmez que le revolver dans vos mains a tiré accidentellement ? Et que trois balles ont été tirées dans le thorax de Petar sans aucune volonté de votre part ?
PUBA : Non.
(Murmure dans la salle d'audience.)
LE JUGE : Sinon ?
PUBA : À ce moment-là, c'est ce que je voulais. Je voulais le tuer. J'ai senti que je devais le tuer. Que c'était la seule chose que je devais faire, et alors… j'ai tiré. (Une pause.) Aujourd'hui, je ne sais plus pourquoi j'ai fait cela. Il me semble que cela se cache dans un coin perdu de mon cerveau et tout ce mois-ci j'ai voulu découvrir cette vérité refoulée. (Une pause.) Maintenant, je ne sais plus pourquoi je l'ai tué. J'ai oublié.
(Murmures dans le public.)
UN CRI DANS LA SALLE : Simulateur.
UN CRI DANS LA SALLE : Il n'est pas fou.
LE JUGE : Je demande le calme. (Une pause. Le murmure s'apaise.) Je prie l'expert psychiatre de présenter le diagnostic sur l'état psychique de l'accusé.
LE PSYCHIATRE : L'accusé a été en observation environ dix jours. L'accusé est une personne tout à fait normale, avec une intelligence plutôt développée. Les connaissances en termes de culture générale sont au-dessus de la moyenne. La seule chose que l'on peut observer du profil psychique de l'accusé est un complexe d'infériorité hypertrophié, insuffisamment compensé, qui trouve ses origines loin dans la petite enfance.
LE JUGE : Merci. Quelqu'un a-t-il une question ?
L'AVOCAT : La défense a une question. Je prie l'expert de m'éclaircir sur une chose. Vous avez dit au début de votre explication que l'accusé était tout à fait normal, et plus tard vous avez démenti cela, affirmant que vous aviez découvert un complexe d'infériorité hypertrophié et insuffisamment compensé.
LE PSYCHIATRE : Tout cela est encore du domaine de la complète normalité. Plus ou moins, chaque homme a ce complexe. À savoir…
LE JUGE : Le tribunal est satisfait de votre réponse. L'objection de la défense est rejetée.
L'AVOCAT : Je veux attirer l'attention du tribunal sur le fait que l'accusé souligne sans cesse qu'il voulait délibérément et avec raison tuer sur le moment, mais qu'il a oublié maintenant cette raison, bien qu'il lui soit apparu constamment que cela était un moyen de défense insensé et absurde. Il est visible que l'accusé dit la vérité. C'est-à-dire, ce que lui considère comme la vérité. Moi, je considère qu'il est impossible qu'un homme normal tue quelqu'un, conduit par un impératif inexorable, et qu'il oublie immédiatement ensuite cet impératif. J'affirme que cela ne peut pas arriver à un homme normal.
LE PSYCHIATRE : Je m'en tiens à mon expertise actuelle. L'accusé est tout à fait normal, en pleine responsabilité de tous les actes qu'il commet. Une névrose qui en dernière instance peut émaner d'un complexe d'infériorité refoulé relève encore du domaine de la normalité, et jamais… (Fondu.)
(Musique.)
PUBA : (Monologue) Cela me semble stupide la manière dont ces gens se disputent pour savoir si je suis fou. L'avocat voulait que je simule la folie. Moi, je ne veux pas me soustraire à la peine. Je sais que je suis coupable. Car aucune raison ne serait suffisamment valable pour que je tue Petar, mon meilleur ami. L'avocat voulait que je mente. Que j'affirme que les coups de revolver étaient partis accidentellement. Mais moi, je ne le veux pas. Ce qui m'attend m'est égal. Ce qui me tourmente, c'est que maintenant je ne sais pas pourquoi je l'ai tué.
(Musique. Acoustique croissante de la salle d'audience.)
LE JUGE : Vous vous appelez ?
ZORKO : Zorko Medić.
LE JUGE : Je vous avertis que vous devez devant le tribunal dire juste la vérité. Depuis quand connaissez-vous l'accusé ?
ZORKO : Quand Petar m'a la première fois invité chez lui, Puba, je veux dire l'accusé, était dans son appartement. Nous nous sommes ainsi connus à cette occasion.
LE JUGE : L'avez-vous vu aussi plus tard ?
ZORKO : Oui. Toujours en compagnie de Petar.
LE JUGE : Comment caractériseriez-vous leurs relations réciproques ? Je veux dire, qu'avez-vous pu remarquer ?
ZORKO : Ben… ce qu'on peut généralement appeler des relations amicales. Même si en moi-même je me suis toujours un peu étonné.
LE JUGE : De quoi vous êtes-vous étonné ?
ZORKO : Cela m'est difficile de l'expliquer comme cela. (Une pause.) J'étais étonné qu'un homme comme l'était Petar tienne autant à Puba. Il était chaque jour avec lui, comme s'ils étaient frères germains, il lui prêtait de l'argent ou, pour mieux dire, il le lui donnait, car je n'ai jamais vu que Puba lui rende le moindre dinar, et ainsi, généralement, toute cette relation.
LE JUGE : Que voulez-vous dire ? Expliquez un peu plus en détail.
ZORKO : Que sais-je… au début je croyais que l'accusé était un cousin de Petar, un cousin pauvre. (Une pause.) C'est-à-dire, il m'était tout le temps inconcevable ce qu'un homme du calibre de Petar pouvait avoir de commun avec un homme comme l'est Puba. Avec un fainéant sans caractère, dégoûtant, oui, je dis dégoûtant et je l'entends littéralement, car, semble-t-il, il ne s'est jamais lavé comme il faut et toujours quand je le voyais, il avait les oreilles couvertes d'une couche brun pâle, qui faisait penser à de la graisse séchée.
LE JUGE : Vous vous êtes éloigné du sujet. C'est la nature des relations entre l'accusé et Petar qui nous intéresse.
ZORKO : Mais je parle aussi de cela. Petar était un homme de grande envergure, plein de connaissances et de capacités pas seulement pour son travail. Il était spirituel et intelligent. En un mot, le meilleur homme que je n'ai jamais connu. J'étais étonné que comme meilleur ami, c'est du moins ainsi qu'il apparaissait, ou comme compagnon, il ait choisi précisément Puba. Si vous voulez, j'étais même jaloux de lui. Je veux dire, de Puba. Je ne l'aimais pas. Cela, c'est certain.
L'AVOCAT : Je proteste. Le témoin a parlé de Petar en termes positifs et de ce que l'accusé ne se lavait pas suffisamment. Cette déclaration n'a rien apporté de concret, sinon tenté de renforcer une opinion défavorable sur l'accusé.
LE JUGE : L'objection est rejetée. Le témoin expose son avis personnel sur les relations entre ces deux personnes. (Il s'adresse au témoin…) Pourriez-vous dire, les connaissant tous deux, quelle raison a pu avoir l'accusé de commettre un meurtre.
ZORKO : Cela, je ne le sais vraiment pas. Je ne comprends absolument pas pourquoi il l'a tué. Il ne pouvait en tirer aucun profit. C'est comme si il avait scié la branche sur laquelle il était assis. (Une pause.) Une telle chose n'a pu être faite que pas une canaille. Un homme vil.
LE JUGE : Accusé, avez-vous quelque chose à dire sur la déclaration du témoin ?
PUBA : Non.
LE JUGE : Est-ce vrai que Petar était votre meilleur ami ?
PUBA : Oui.
LE JUGE : Vous a-t-il donné ou prêté de l'argent ?
PUBA : Oui.
LE JUGE : Combien ? Et de quoi s'agissait-il alors ? Un don ou un prêt ?
PUBA : (Hésitant) Ben, c'était l'un et l'autre. Quand je n'avais pas d'argent, il me donnait d'ordinaire quelque chose, ou m'invitait à déjeuner ou dîner.
LE JUGE : Avez-vous rendu l'argent que vous receviez ainsi ?
PUBA : (Hésitant) Ben, c'était l'un et l'autre. Une fois, quand j'ai gagné dix mille à la loterie, je lui en ai donné cinq. Il ne voulait même pas accepter cela, je l'ai persuadé à grand-peine.
LE JUGE : Comment pouvez-vous nous expliquer cette relation ? Avez-vous vous-même rendu un service à Petar en échange de cet argent ?
PUBA : Non.
LE JUGE : Considérez-vous normal que quelqu'un continuellement vous donne de l'argent et vous nourrisse et qu'en fin de compte vous le tuiez ? (Une pause.) Pourquoi Petar vous donnait-il cet argent ?
PUBA : (Hésitant) Ben… par amitié.
LE JUGE : Il n'y avait absolument aucune autre raison ?
PUBA : Non.
LE JUGE : Quel était votre dernier emploi ? (Fondu.)
(Transition.)
PUBA : (Monologue) Ils me tourmentent. Pourquoi me tourmentent-ils ainsi ? Je leur ai tout dit. J'ai avoué. Tout. J'ai tué. Sans raison. J'ai oublié la raison. Je l'ai tué. Comme quelqu'un de méprisable. Comme le dernier des salauds. Comme un dément. Pourquoi me torturent-ils à présent ? Pourquoi de nouveau maintenant me plantent-ils sous le nez l'argent et l'amitié ? Pourquoi maintenant me rappellent-ils tout cela ? J'ai fait ce que personne n'aurait fait. Quelque chose comme un parricide. Comme un infanticide. Quelque chose de répugnant. Sans raison. Pourquoi ne me condamnent-ils pas tout de suite ? Pourquoi ne me mettent-ils pas à mort tout de suite ? Qu'attendent-ils ? Je suis coupable. Je l'ai reconnu. Je ne veux pas qu'ils me tourmentent en me forçant à entendre de nouveau tout ce que Petar a fait pour moi. Et que cela me résonne dans la tête comme un cri dans une caverne spectrale pleine d'horreurs.
(Musique. Le murmure du la salle d'audience.)
LE JUGE : Vous vous appelez ?
PAVLE : Pavle Terić. (Il parle avec un accent dalmate.)
LE JUGE : Depuis quand connaissez-vous l'accusé ?
PAVL : Une fois, le défunt Petar m'a demandé si je pouvais embaucher l'un de ses amis. Comme il fallait encore quelques hommes dans mon entreprise, j'ai dit que je pouvais.
LE JUGE : Vous êtes directeur d'une entreprise ?
PAVLE : Oui.
LE JUGE : Et ?
PAVLE : Et alors, l'accusé est venu à moi et je l'ai embauché.
LE JUGE : Étiez-vous content de lui ?
PAVLE : Allons donc ! Il a été sérieux les premiers jours et faisait des efforts. Mais après… de pire en pire.
LE JUGE : Que voulez-vous dire ?
PAVLE : Comme cela. Quel employé était-ce là ? Il était en retard au travail, régulièrement je recevais des plaintes qu'il avait jusqu'à une demi-heure de retard, il n'exécutait pas son travail à temps, il est insolent, et comment vous expliquer… comme cela, il ne valait rien.
LE JUGE : Pourquoi ne l'avez-vous pas renvoyé ?
PAVLE : Et comment ? Aujourd'hui, c'est plus difficile d'en licencier un que d'en accueillir cent. Et à part cela… (Une pause.)
LE JUGE : Poursuivez.
PAVLE : Vous savez, j'étais bien avec le défunt Petar. Une fois, je lui ai dit : « Ton Puba n'est pas vraiment quelqu'un d'intéressant », et lui m'a dit : « Laisse-le, c'est un malheureux. Il n'aura jamais de chance. Il est à lui-même son plus grand ennemi. Il faut le laisser vivre, le pauvre. »
LE JUGE : Cela veut dire que vous l'avez toléré dans l'entreprise juste à cause de Petar. À cause de la recommandation de Petar. Sinon vous ne l'auriez pas supporté ?
PAVLE : Ben, pas vraiment tout à fait ainsi. Vous savez… c'est très difficile aujourd'hui avec les licenciements. Si vous licenciez quelqu'un sous prétexte qu'il est incapable, alors immédiatement le syndicat et l'inspection du travail s'en mêlent et tout demandent pourquoi alors vous l'avez embauché s'il est incapable. Vous saviez vraisemblablement qui vous acceptiez au travail.
LE JUGE : Vous avez vu l'accusé presque tous les jours. Que pourriez-vous encore dire à son sujet ? Je veux dire, en tant qu'homme.
PAVLE : Comment vous dire… dans l'entreprise je m'efforçais de ne pas le voir. Comme s'il n'était pas là. Je considérais que c'était une nature incorrigible, vicieuse, qui s'était habitué à vivre sur le compte des autres et je ne voulais juste pas m'énerver inutilement. Je l'ai placé à un poste de travail où il gênait le moins, plutôt en fait, où il pouvait commettre le moins de dégâts.
LE JUGE : Visitiez-vous fréquemment le défunt Petar ?
PAVLE : Je ne pourrais pas dire cela. Deux ou trois fois par mois.
LE JUGE : Avez-vous rencontré là-bas l'accusé ?
PAVLE : Presque à chaque fois.
LE JUGE : Que faisait-il là-bas ?
PAVLE : Rien. Simplement, il était là.
LE JUGE : Comme quoi ? Un ami ? Un locataire ?
PAVLE : Probablement comme ami. Je n'en sais rien.
LE JUGE : Quelle était la relation entre Petar et l'accusé ? Je veux dire, comment la compreniez-vous ?
PAVLE : Une dépendance. S'il n'y avait eu Petar, Puba n'aurait même pas eu une cuillère de soupe à manger. Petar s'occupait de tout. Il lui a trouvé un logement, et un emploi. Et il l'a nourri. Puba était le plus grand parasite que je n'ai jamais vu.
LE JUGE : Pourquoi Petar permettait-il que l'accusé profite de lui ?
PAVLE : Je ne sais pas. À part la première conversation, je n'ai plus rien demandé à Petar. En dernière ressort, cela ne me concernait pas.
LE JUGE : Trouvez-vous quelque raison, quelque motif caché pour lequel l'accusé a tué Petar ?
PAVLE : Non ? Je ne peux pas l'imaginer.
LE JUGE : Merci beaucoup. Accusé, avez-vous quelque chose à ajouter à l'exposé du témoin ?
PUBA : Non.
LE JUGE : Donc, les allégations selon lesquelles Petar vous a rendu des services qui dépassent la nature des relations ordinaires entre amis sont exactes ?
PUBA : Je ne sais pas si on peut définir cela ainsi, mais il a fait beaucoup pour moi.
LE JUGE : Les témoins disent que vous profitiez de lui.
PUBA : Ce n'est pas exact. Je peux profiter seulement de celui qui dépend de moi. Comment aurais-je pu profiter d'un homme pour lequel je n'étais rien ni personne, un homme qui était totalement libre ? Libre à mon égard. Libre de faire ce qu'il veut. S'il a fait quelque chose pour moi, s'il m'a donné quelque chose, alors c'est qu'il le voulait lui-même.
LE JUGE : Toute cette relation n'est pas claire. Par moment, il pourrait sembler que vous le faisiez chanter.
PUBA : Cela, je ne le permets pas. Bien que je sois un meurtrier, je ne suis pas un maître-chanteur.
LE JUGE : Bon, saviez-vous quelque chose de Petar que les autres ignoraient ?
PUBZ : Non, je n'ai jamais rien su de Petar que tous les autres ignoraient. Pour autant que je sache, Petar avait un passé absolument clair.
LE JUGE : Et inversement ? Je ne parviens pas du tout à comprendre cette relation. Et inversement ?
PUBA : Comment inversement ?
LE JUGE : Vous voulez dire qu'il n'était pas obligé et même pas reconnaissant pour un service que vous lui auriez rendu.
PUBA : Que signifie être tenu ? Vous voulez dire, obligé juridiquement de s'occuper de moi, ou moralement ?
LE JUGE : Je veux dire moralement.
PUBA : Cela il ne l'était assurément pas. S'il y en a un qui était obligé envers quelqu'un, alors c'est moi qui étais son débiteur. Un débiteur moral pour utiliser votre terminologie.
LE JUGE : Et vous lui avez joliment rendu.
PUBA : Je ne pense pas à cela. Il m'a sauvé la vie, avant, à la guerre.
LE JUGE : Vous avez déclaré que vous n'aviez pas participé à la guerre.
PUBA : Non, mais Petar m'a extirpé sur ses épaules d'une maison en feu dans laquelle j'ai été blessé lors d'un bombardement. C'est ainsi que nous nous sommes connus. Par conséquent, il n'y a que moi qui pouvais lui être reconnaissant et obligé. Petar n'avait aucune obligation envers moi. Il était totalement libre.
(Murmures dans la salle d'audience – Indignation.)
LE JUGE : Je ne comprends pas comment vous pouvez ainsi parler tranquillement de l'homme que vous avez tué et qui a toujours tout fait pour vous. Vous ne vous répugnez pas à vous-même ? (Fondu.)
(Les derniers mots du juge comme un cri à travers la musique.)
PUBA : (Monologue.) J'ai tué Petar et c'est pour cela qu'ils me jugent. Je sais que j'avais une raison de le tuer, même si maintenant j'ai oublié laquelle. J'ai tué Petar, mon meilleur ami, qui a toujours fait pour moi tout ce qu'il pouvait. Et à présent ils me demandent si je me répugne à moi-même. C'est à peine s'ils ne disent pas que je suis un monstre. Je le reconnais. Je suis sûrement un monstre. Il ne pouvait pas exister quelque grande raison suffisante pour que je le tue vraiment. Cette raison a dû naître en une seconde dans mon cerveau dément. Je suis tout de même fou d'une certaine manière. Pour moi, et pas pour les autres… (Une pause.) Je voudrais me souvenir de cette raison. Je serais plus tranquille. Alors, cela me serait plus facile. Je serais plus clair avec moi-même. Je ne pourrais plus m'abriter derrière aucun paravent. Je serais nu face à moi-même. (Une pause.) Ce n'est pas important qu'ils me condamnent. L'important c'est que je sois clair avec moi-même. Ils veulent découvrir pourquoi Petar était lié à moi. Pourquoi il devait faire tout ce qu'il a fait pour moi. Et il y a là une erreur. Petar ne le devait pas. Il était simplement bon. Il voulait le faire. Il était libre de faire quelque chose ou pas. C'était moi qui était lié. Moi, je n'étais pas libre. Moi, je dépendais de lui, parce que je ne pouvais pas faire autrement. Moi, j'étais prisonnier de ses services et de son amitié. Je savais que je ne pouvais rien être sans lui. Que je m'effondrerais. Car je suis un incapable. Car j'ai toujours été incapable de m'occuper de moi, vivre… Mais alors pourquoi l'ai-je tué ?…
(Musique. Murmure croissant de la salle d'audience.)
LE JUGE : Vous êtes l'épouse du défunt Petar ?
MILENA : Oui.
LE JUGE : Depuis quand connaissez-vous l'accusé ?
MILENA : Depuis le début. Dès l'instant où j'ai rencontré Petar, je connais aussi cette calamité. Cette créature. Il était toujours collé à Petar et réclamait quelque chose. Il a dit quelque chose aussi sur l'amitié, bien qu'il n'était pas digne même de nettoyer les chaussures de Petar.
LE JUGE : On dirait qu'il ne vous a jamais été sympathique.
MILENA : Lui ? Sympathique ? Il n'était sympathique à personne. Un tel être abject et un cochon ne peut être sympathique à personne.
L'AVOCAT : Je proteste. Que l'accusé soit coupable ou non, ce n'est pas une raison pour le qualifier d'expressions injurieuses.
LE JUGE : Objection acceptée. Nous comprenons votre amertume, mais vous prions de vous modérer lorsque vous parlez de l'accusé.
MILENA : Tout cela est trop tard à présent. Comment puis-je être modérée ? Tout est terminé maintenant. Petar n'est plus, et c'est celui qui est assis là avec une telle expression d'innocence au visage qui l'a tué, celui-là qui chaque jour est venu à la maison, s'est assis à la même table, que j'ai moi-même nourri, à qui j'ai tellement de fois servi la nourriture dans l'assiette de ma propre main. Il aurait mieux valu que je la tranche. Petar est mort parce que celui-là ici a dit que Petar était tout pour lui. Tu te souviens ? Oui, tu te souviens, toi là-bas qui restes assis comme une momie, de tout ce que tu as dit. Tu te souviens quand tu as dit que Petar était et ton père et ta mère, que tu n'existerais pas sans Petar, que tu peux remercier Petar pour tout. Tu te souviens comme tu venais chaque fois qu'on te virait d'un travail, la face contrite, comment tu parlais : je suis incapable de vivre, les gens ne m'aiment pas, je ne suis bon à rien, Petar, aide-moi, toi au moins tu sais que je ne suis pas comme cela, tu sais que je ne suis pas mauvais, juste que je ne peux pas, les gens ne me comprennent pas… tu te souviens de tout cela… dis quelque chose à présent… et toi, à la fin, tu l'as tué… et pourquoi ? Pourquoi ? Dis-le maintenant.
(Elle s'étrangle dans le spasme d'un sanglot furtif.)
LE JUGE : (Après une courte pause.) Vous n'approuviez pas cette amitié entre votre mari et l'accusé ?
MILENA : Bien sûr que non. Comment aurais-je pu l'approuver ? Quand je me souviens combien de fois nous lui avons donné de l'argent, alors qu'il nous était aussi tellement nécessaire, combien de choses je n'ai pas pu acheter parce qu'il fallait le prêter à Puba. (Ironiquement.) Prêter. Comme Petar était naïf. Il était trop gentil. Il croyait tout le monde… (Une pause.) Vous parlez d'amitié. Quelle amitié était-ce là ? Il ne peut y avoir d'amitié qu'entre deux personnes égales, qui ont les mêmes opinions, les mêmes intérêts… et là, là il n'y avait que « Petar, à l'aide », « Petar, donne-moi »…
LE JUGE : Tout de même, votre époux d'une certaine manière aimait l'accusé. Il était bien disposé à son égard…
MILENA : Il ne l'aimait pas vraiment. Il était juste trop gentil. Il croyait trop dans l'Homme. C'est sa position personnelle envers les hommes. C'est de l'humanisme, le véritable, disait-il. Il connaissait les défauts de Puba, il savait que Puba n'était rien ni personne, mais il y trouvait là une justification. Il voulait comprendre chacun. Il est peut-être objectivement mauvais, disait-il. Inutile socialement, un type improductif. Mais il a besoin d'aide. Lui donner une opportunité. Une chance… et voilà quelle chance il lui a donnée. Je lui ai demandé pourquoi nous justement, nous devions être plus sociaux que ces imbéciles, et il n'a pas su me répondre à cela. Il disait toujours que nous devions être des hommes, que nous devions aider autant que nous pouvions… Petar était un idéaliste. Et voilà ce qui l'attendait. Depuis qu'il a tiré Puba de cet incendie sur ses épaules, c'est comme s'il avait chargé un cauchemar, son malheur pour le reste de sa vie, Puba était son mauvais génie.
LE JUGE : Pour quelle raison l'accusé a-t-il tué votre époux selon vous ? Cela vous paraît-il normal, évident ?
MILENA : Cela m'est évident. J'ai pressenti que cela devait finir ainsi.
LE JUGE : Pourquoi ?
MILENA : Parce que Puba est comme cela. Une ordure. Mauvais, envieux, un tel homme ne peut apporter que le malheur.
LE JUGE : Merci beaucoup. Accusé, avez-vous quelque remarque à faire sur la déclaration du témoin ?
PUBA : Non. Milena a dit exactement ce qui était. Elle a tout à fait raison. Juste, s'il vous plaît, puis-je poser une question ?
LE JUGE : Vous pouvez.
PUBA : J'ai tout reconnu et j'avoue. Pourquoi alors tout cela ? Ce n'est pas nécessaire. J'ai moi-même déjà dit que je suis un homme inutile et mauvais. Je ne me dédouane pas. J'ai fait quelque chose que je n'aurais pas dû et je suis prêt à en assumer les conséquences.
LE JUGE : Pourquoi avez-vous fait cela ?
PUBA : Je l'ai déjà dit : je ne sais pas.
LE JUGE : Et vous l'avez tué délibérément ?
PUBA : Oui. Au moment où je l'ai tué, j'avais l'intention, la raison, le motif, ce que vous voulez. Aujourd'hui, je ne le tuerais vraisemblablement pas. Mais ce jour-là, je l'ai tué.
LE JUGE : Voulez-vous nous raconter comment cela s'est passé ? Je vous rappelle que vous ne devez dire que la vérité devant le tribunal. Les témoins qui étaient présents vous corrigeront au moindre détail inexact.
PUBA : Je vous raconterai tout ce dont je me souviens. Petar nous avait invités à dîner. Cela faisait, je crois, exactement trois ans que Milena et lui s'étaient mariés. Il y avait là, à part nous trois, Zorko et Pavle avec leur femme. Et tout se passait bien, normal. Après le dîner, nous nous sommes assis, nous avons bu un peu et discutions. Une soirée entre amis tout à fait ordinaire. (Fondu.)
(L'acoustique croissante de la soirée chez Petar.)
PAVLE : … et nous tous, tes amis, nous souhaitons à ta femme et toi nos meilleurs vœux.
LES AUTRES : Santé, santé…
PETAR : Merci à vous. Seulement, je n'avais pas imaginé cela ainsi, aussi officiel. Je vous ai invités pour que nous nous asseyons un peu, comme toujours jusque-là, sans aucune cérémonie.
PUBA : C'est comme cela. Je suis d'accord. Sans cérémonie. Milena, qu'en est-il de ce vin ?
PETAR : Allez, ne t'en mêle pas. Ne m'interromps pas…
ZORKO : Petar, vous ne me l'avez pas encore raconté. Où vous êtes-vous rencontrés toi et Milena ? Vous vous connaissiez auparavant ?
PETAR : Non. Nous nous sommes connus ici. Milena m'a approché et m'a dit qu'elle attendait depuis longtemps l'occasion de me connaître.
MILENA : Tu vois comment tu es. Comment peux-tu mentir ainsi. Les gens vont s'imaginer encore que…
PETAR : (Il rit.) Je plaisante, je plaisante, en fait, c'est Puba qui nous a permis de nous connaître.
PAVLE : Puba ?
PETAR : Imaginez. Puba qui n'a jamais dans sa vie fait quelque chose de valable, c'est lui qui nous a fait nous connaître. Je te le dis, Puba. Tu me portes chance. Tu vois, si tu n'avais pas été là, je serais resté sans Milena.
SMILJKA : Allez-vous vous marier bientôt aussi, Puba ?
PUBA : (Embarrassé.) Que sais-je… il y a encore le temps.
PAVLE : Le plus tard est le mieux. Il n'est jamais trop tard. N'est-ce pas, Puba ?
PETAR : C'est mieux pour lui comme cela. N'est-ce pas Puba ? Tu n'as pas mal à la tête. Tu ne te soucies pas non plus de la femme et des enfants, tu ne te tourmentes pas non plus.
SMILJKA : Ne les écoutez pas, Puba. Qu'ils parlent seulement. Cela ne vaut rien d'être seul.
ZORKO : Vous les femmes, vous êtes terribles. Dès que vous voyez quelqu'un d'heureux, vous vous précipitez sur lui afin, le pauvre, de le rendre malheureux au plus vite.
MILENA : Oui, oui. Vous êtes tous des malheureux. Seul Puba est heureux.
PETAR : Laissez mon Puba en paix. Je ne permets pas qu'on l'embête. N'est-ce pas, Puba ? Je suis ton meilleur ami et point final. N'est-ce pas ainsi ?
PUBA : C'est ainsi.
SMILJKA : En outre, c'est tout à fait sérieux, j'ai lu que les hommes mariés vivent bien plus longtemps.
PAVLE : Mais comment… (Il rit de sa plaisanterie.) Ce sont certainement les femmes qui l'ont imaginé.
(Rires. Smiljka proteste.)
PUBA : C'est exact, je l'ai lu moi aussi. Ils ont soi-disant fait une enquête en Amérique…
ZORKO : (Il rit.) Un véritable candidat au mariage se manifeste.
SMILJKA : Pourquoi riez-vous ? L'homme vous dit sérieusement qu'il l'a lu lui aussi, et vous…
PETAR : (Il rit.) Tous mes respects à toi, mais tu sais, Puba aime parfois exagérer un peu… hein, Puba ? Reconnais que tu viens d'inventer cela à l'instant. D'ailleurs toi, tu ne lis jamais rien…
ZORKO : Laisse-le… tu vois qu'il veut se marier.
MILENA : Et bien qu'il se marie… Personne ne l'empêche… (Un peu fielleuse.)
PETAR : Ah non… Il ne le peut pas. Ce n'est pas assez que je m'occupe seulement de lui, mais il faut alors aussi que je m'occupe de la femme et des enfants.
(Tout cela est dit en plaisantant à demi.)
PAVLE : Mais peut-être trouvera-t-il une femme bien… Comme il t'a fait connaître Milena.
PETAR : Oui, mais alors il faut qu'elle soit non seulement bien mais qu'elle ne voit pas aussi comment est Puba.
(Tous rient.)
Excuse, Puba, pour ces petites plaisanteries. On ne peut pas toujours être sérieux.
PUBA : Ce n'est rien, ce n'est rien.
PETAR : Observe-le à présent. Il s'en faut de peu qu'il ne se soit fâché. Ne t'en fais pas, Puba, tu sais que je suis ton ami. Je t'ai trouvé l'occasion de gagner quelque chose. Je te le dirai demain. Voilà, tu vois. Ce que tu deviendrais sans moi.
(Durant toute cette conversation, on trinque et on remplit les verres.)
PAVLE : Assez de ses discussions sérieuses !
(Cliquetis des verres. Ambiance agréable et joyeuse.)
PAVLE : (Il entame une chanson, les hommes le suivent. En arrière plan, on entend les voix des femmes.)
ZORKO : Lorsque j'entends cette chanson, je me souviens de la capitulation de l'Italie. Alors il nous a semblé en substance que la guerre était terminée. Si quelqu'un alors m'avait dit qu'elle durerait encore deux ans, je l'aurais tué.
PAVLE : Je me suis alors empiffré de conserves italiennes comme jamais dans ma vie.
PETAR : Allez, Puba, mange. Aujourd'hui, tu ne fais que te taire. Qu'as-tu ?
PUBA : Voilà, je pense à quelque chose.
PETAR : Aucun intérêt en cela. Allez, bouge-toi un peu. Nous sommes tous bien disposés, et il n'y a que toi qui me gâte la compagnie.
PAVLE : Écoute, Petar, tu m'as dit que tu avais un certain trophée d'un poste de commandement italien, et tu ne me l'as encore jamais montré.
PETAR : Le colonel me l'a personnellement remis à l'occasion de la reddition de la garnison. Une espèce de petit gringalet ridicule. Quand je l'ai vu, j'ai eu de la peine à ne pas rire. Ainsi menu, des espèces de longues moustaches hirsutes et il se tient calmement devant moi comme si j'étais un général. Il a voulu que nous inventorions tout, chaque munition, alors que nous étions pressés d'emporter tout le matériel de la place avant que n'arrivent les Allemands. J'ai eu du mal à le convaincre qu'il suffisait que je signe « en blanc », et qu'il se charge de remplir l'inventaire s'il le voulait.
ZORKO : Et à quoi cela lui servira-t-il ?
PETAR : Qu'il ait tout livré régulièrement et que nous avons tout emporté selon les règles. Certainement pour qu'on ne lui dise pas qu'il avait vendu quelque chose.
ZORKO : Et que t'a-t-il offert ?
PETAR : Un revolver spécial fabriqué à la main ! Il a dit qu'il avait été fabriqué spécialement pour lui.
PAVLE : Apporte-le, s'il te plaît, que nous le voyions justement.
PETAR : (Il se lève. Des pas.)
MILENA : Petar, non, je t'en prie ! Je n'aime pas les armes dans la maison.
PAVLE : Il est splendide. Je n'en avais encore jamais vu de tel.
PETAR : Faites attention, il est chargé.
ZORKO : Il est magnifique.
PUBA : Donnez que je le vois moi aussi.
MILENA : Puba, s'il te plaît, ne vous amusez pas. Il est chargé.
PETAR : Ne sois pas ridicule, Milena. Tu te comportes comme toutes les femmes.
PUBA : Ne crains rien.
ZORKO : Quand les femmes voient un revolver dans un appartement, elles se comportent comme quand elles voient une souris sous une chaise.
PUBA : Milena, regarde comme cela est épouvantable. Zorko, les mains en l'air.
ZORKO : (Dans la plaisanterie.) Je me rends, général. À votre merci ou votre disgrâce.
PUBA : C'est bien. Smiljka, embrasse-moi maintenant sur la joue droite. Tu vois, ton mari s'est rendu à ma merci ou à ma disgrâce. Embrasse-moi vite ou je vais tirer sur lui.
MILENA : Puba, ne plaisantez pas.
ZORKO : (Dans la plaisanterie.) Smiljka, qu'attends-tu ? Ne vois-tu donc pas que ton époux est en danger de mort et que le général Puba est aujourd'hui de mauvaise humeur.
SMILJKA : Voilà, tout de suite, général. (Des pas et le bruit d'une bise.)
PUBA : C'est bien, c'est bien !
PETAR : Pardieu, c'est ce qu'on appelle une femme bien.
PAVLE : Puba est aujourd'hui le plus important. Un chef terrible.
PUBA : Zorko, toi, tu peux baisser les bras.
ZORKO : Merci, général.
PETAR : (Plaisantant.) Et moi, que dois-je faire, général ?
PUBA : Toi ? Pardieu, mais ce que vous devez tous faire. Vous prosterner devant votre général.
TOUS : (Ils se prosternent et rient. Ils lancent des remarques comiques.)
PUBA : Et toi, Milena ? Qu'attends-tu, prosterne-toi.
MILENA : Laisse-moi tranquille. Quelles plaisanteries stupides ce sont là.
PUBA : Toi aussi tu dois te prosterner devant moi. (Il change de voix.) Prosterne-toi vite. (Une pause.)
PUBA : Voilà, tu vois. Ce n'est absolument pas difficile. (Une pause.) Un peu plus tôt, c'est moi qui étais le moins important, le moins valable parmi vous tous, et à présent vous me regardez tous et suivez ce que je vais faire, ce que je vais dire, où je vais regarder.
(Une pause. On entend des pas.)
PUBA : Arrête. Ne bouge pas.
PAVLE : Laisse-moi m'asseoir.
PUBA : Non. C'est à moi maintenant d'être un peu le directeur. Seulement cinq minutes. Pour que tu voies de quoi cela a l'air quand les autres disent ce qui se peut et ce qui ne se peut pas.
MILENA : Laisse les gens s'asseoir.
PUBA : Paix. Maintenant, c'est moi qui commande ici. Pavle, assieds-toi par-terre. Mais vite.
PAVLE : Mais… mais…
PETAR : Puba, cela suffit maintenant. Ne maltraite pas mes invités. Lâche ce revolver.
PUBA : Laisse-moi. Je ne te veux rien, à toi. Pavle, tu ne t'es pas encore assis.
PETAR : Ne sois pas idiot, Puba. (Il hausse le ton.) Lâche le revolver !
(Une pause. Des pas.)
PUBA : Ne m'approche pas.
(Trois coups de feu. Un cri de femme. La musique.)
LE JUGE : Est-ce tout ? Vous avez tout dit ?
PUBA : Oui. C'est tout.
(Musique.)
PUBA : (Monologue.) J'ai tué Petar. Je suis coupable, et cela m'est égal comment ils vont me condamner. Seulement maintenant je sais ce que j'ai voulu crier à Petar.
(Transition musicale.)
PUBA : (Il crie.) Laisse-moi aussi, que diable, une bonne fois tranquille. Laisse-moi avec tes conseils de bonnes actions. Laisse-moi enfin m'effondrer une bonne fois pour toutes. S'il n'y avait toi, ta bonté, tes services et tes conseils, je ne saurais pas combien je suis petit, misérable et impuissant. Si je suis méprisable, laisse-moi être méprisable en paix.
(Trois coups de feu. Un cri de femme. Musique finale.)
Traduit par © Nicolas RALJEVIĆ en septembre 2015